Episode 19 👉Gare de Béning: ouverture vers Merlebach 👈 (16/10/24)



Petite plongée à Freyming-Merlebach et alentours.

Au coeur d'un ancien grand carrefour ferroviaire et toujours très bien desservie, la gare de Béning souffre pourtant d'une position enclavée.

 Comment améliorer cela?








Petite mise en situation pour commencer. On est au cœur du «bassin houiller lorrain», conurbation post-industrielle, environ 100 000 habitants (selon ce qu’on compte), traversé par la ligne ferroviaire Metz – Sarrebruck.


Les quais de gare, vue vers Forbach
Derrière Forbach, Béning est la deuxième grande gare, rayonnant sur l’essentiel de la partie- est du bassin, essentiellement Freyming-Merlebach. C’est ici que se débranche la ligne de Sarreguemines, et la ligne fret vers Creutzwald et Thionville. 


Après près d’un siècle de balbutiements, ce n’est qu’au début du 20° siècle (pendant l’annexion) que l’industrie charbonnière prend son essor, pour atteindre son apogée pendant les 30 Glorieuses, et disparaître totalement au début des années 2000. https://hal.science/hal-04149867v1/document

Les faisceaux ferroviaires ont recouvert une bonne partie du fond de vallée de la Rosselle et la Merle. Dernier changement notable, au cours des années 70, la construction au même endroit des autoroutes A320 puis A4 (appelées A32 à l’époque).
Freyming-Merlebach à la fin des années 50 ; on remarque l’importance des emprises ferroviaires, et l’absence des autoroutes. (@IGN)

Malgré le démantèlement de la plupart des emprises ferroviaires industrielles (ex-HBL ; n’y subsiste guère que les deux grandes lignes SNCF qui s’y croisent.), cet empilement d’infrastructures explique la circulation très contrainte et complexe pour traverser la vallée.


Les anciennes rues sont devenues des cul-de-sac (parfois franchement glauques), et il n’y a plus qu’un seul itinéraire pour franchir la vallée de la Rosselle (sauf à faire des détours de 4 km). Les villages du versant sud (Betting et Béning) sont enclavés par ces emprises.



Et c’est de ce côté que se situe la gare (donc à Béning). Ce qui la rend difficilement accessible de l’essentiel des habitations, à Freyming-Merlebach. Du moins sans voiture, alors qu’on est à moins d’1 km à vol d’oiseau.


En plus du détour imposé, l’itinéraire est vraiment pas avenant. S’il n’y avait que les coupures ferroviaires et autoroutières, ça irait encore. Mais il faut ajouter l’absence de trottoirs, la circulation intensive sur les rues et la désaffection en fond de décors.




Illustration historique du lieu : cette banderole « maison victime de dégâts miniers », présente depuis au moins 20 ans (elle était moins recouverte à l'époque…).








 
... Ou ce panonceau «A32» ; l’autoroute a été renommée «A320» en… 1996.


C’est comme dans les Rives de Moselle (autour d'Hagondange et Maizières), on est dans un bassin post-industriel sans transports publics et où la circulation urbaine est anormalement abondante. Ce qui empêche l’émergence de la marche, du vélo ou trottinettes.
https://mocrilorn.blogspot.com/2022/12/episode-4-la-tremie-de-marange-silvange.html




Voilà donc le problème : malgré une bonne desserte et un bassin de population important, la gare de Béning est handicapée par son accessibilité particulièrement mauvaise. Comment faire pour corriger cela facilement ?

Une des nombreuses interruptions de trottoirs, ici rue de la gare entre Béning et Betting. Au fond, le pont de la nouvelle route de Betting (RD80)





Bon, alors au premier palier, on a la solution de soigner l’accessibilité de l’itinéraire. En plus de le sécuriser, ce serait l’occasion de rafraîchir les voiries, ce qui n’a plus été fait parfois depuis un petit demi-siècle…

Un truc bête et simple, par exemple : shunter la boucle et faire un accès direct au pont de la RD80.
Mais bon même avec des cheminements pour modes doux correctement faits, ça ne resterait pas terrible comme ambiance, et cela conserve le détour.


Et en second pallier, l’autre idée (ce qui est suggéré depuis le début), c’est de permettre l’accès à la gare par l’autre côté. On arrive directement côté de Merlebach (il n’y a qu’à passer sous le viaduc de l’A320).


En vrai il y a déjà des petits malins qui le font. Il suffit de traverser le faisceau ferroviaire à pieds. Pas franchement légal certes, mais ça raccourcit beaucoup, l’itinéraire est finalement guère moins désagréable, guère moins sécure, et il n’y a ni panneau ni clôture, alors… 

Pour ouvrir un accès nord, il y a plein de modèles. Le plus optimal paraît être celui-ci : une passerelle avec ascenseurs qui franchit les quais de gare et le triage utilisé, un parking et un accès sur les emprises désaffectées, et un raccord rue du "parc à Charbon".



On a plein de variantes et d’alternatives, mais moins pertinentes. Par exemple, pourquoi une passerelle, plutôt que de prolonger le souterrain existant ? Parce que pour cette distance plutôt longue (>60m), ce serait plus cher, plus lourd à réaliser, et potentiellement plus glauque.

Le souterrain de la gare de Béning





Cela serait évidemment l’occasion de rendre la gare accessible PMR (on touche du doigt le problème de lenteur de mise en accessibilité des gares, même d’importance comme celle-ci). Même si cela doit être possible par le souterrain existant.




Comme vous pouvez le constater, il y a au nord de la gare un important triage ferroviaire, dont une bonne moitié est désaffectée, depuis une bonne quinzaine d’années (à en juger au développement de la forêt qui s’y épanouit).

La SNCF aurait quand-même pu déferrer les voies avant de les délaisser durablement, parce que maintenant que les branches sont enroulées autour, bon courage…


Donc a priori pas de problème pour réutiliser la partie abandonnée (accès + parking). Si malgré tout la SNCF, propriétaire des emprises, bloque (on ne sait jamais avec eux), on peut toujours faire une longue passerelle de 150m qui survole le tout.




Le coût d’une mise en accessibilité d’une gare de ce type à trois quais avec une passerelle se situe entre 5 et 10M. Plus si on ajoute des fioritures architecturales, encore plus si on refait toute la gare.



Pour un projet du type mise en accessibilité de la gare de Béning, plus son ouverture vers le nord, on peut s’en sortir pour un budget d’environ 10M€ pour la version courte, autour des 15M€ avec la passerelle longue (exemple: Angoulême). 

Vue sur le faisceau de Béning depuis le côté Merlebach. On aperçoit le bâtiment de la gare en arrière-plan


NB : On parle bien de projet standard. Si les architectes veulent valoriser le site (et il y a du boulot), ils pourront imaginer un relooking de cette vaillante bâtisse style reconstruction va-vite des années 50, qui n’a pas vieilli super.




Cette rue du parc à Charbon a l'air de nous tendre les bras, mais sommes-nous certains de pouvoir utiliser ? Il ne semble y avoir aucun parasitage avec les éventuels projets de ce site, ces derniers étant pour le moins fluets.

La voirie est déjà prête, y compris même les trottoirs, c’est dire, mais elle ne sert tellement à rien depuis tant d’années que Dame Nature arrive déjà à grignotter ces aménagements n’ayant jamais servi.


Petite parenthèse, on peut d’ailleurs regretter l’absence de vision pour ces friches, alors qu’elles sont largement valorisables. Là, on a une grosse emprise tellement polluée que même la broussaille n’arrive pas à s’y développer.


La friche du parc à charbon. Contrairement au triage ferroviaire, la végétation n’arrive pas à reprendre ses droits.


Inutile donc de rendre le site à la nature. Entre les échangeurs autoroutiers et les voies ferrées, on a un terrain parfait pour accueillir une zone logistique (au lieu, par exemple, d’aller artificialiser des hectares de champs à Hambach…😡)



Mais les rares projets, régulièrement abrogés ou revus à la baisse consistent en un équipement médical, qui serait bien mieux placé au sein de la ville. Mais bref, cela n’empêche pas la création d’un cheminement jusqu’à l’arrière-gare. Et dans l’attente que ces projets se concrétisent, cette variante permettrait déjà de donner enfin une fonction à cette rue déjà aménagée depuis longtemps (même les trottoirs !). Inutilisée, l’ambiance n’y est pas non plus fort chaleureuse…
La rue se finit (elle-aussi) en cul-de-sac. Un ancien transformateur semble y avoir été reconverti en salle de shoot…

Mais en cas d’indisponibilité du parc à Charbon, on peut alors utiliser l’ex-route de Betting, et le chemin SNCF (fermé) qui longe les voies.

L’occasion de revitaliser un peu cette impasse. On n’est pas embêté par la circulation mais ce n’est pas sympa pour autant. Pire que le parc à charbon. Va expliquer à une lycéenne qu’elle doit traverser seule les baraques abandonnées, la vieille tôle, la déchetterie et les empilements de voitures fracassées, le tout éventuellement de nuit. Succès garanti !
La route de Betting (l’ex D80 mise en impasse lors de la construction de l’A4)


Remarque : que l’on utilise le parc à charbon ou la rue de Betting, cela ne change rien sur la configuration de la passerelle, qu’elle soit courte ou longue et qu’on utilise le triage désaffecté ou non.


Autre alternative: on peut faire une passerelle plus simple qui ne fait que traverser les voies ferrées sans desservir les quais. 

Ici en exemple d’une passerelle survolant l’ensemble du site SNCF, reliant le parc à Charbon et la rue de la gare, soit environ 200m de linéaire.




Cela change plusieurs petites choses:

Cela ne serait donc pas un équipement intégrant la gare, mais un passage public, utilisable même lorsque la gare est fermée (la nuit), et en la déportant un peu vers l’ouest, elle pourrait être moins longue, donc moins coûteuse.

Ici la version d’une passerelle la plus courte possible. Le cas échéant elle se raccorderait plutôt à la route de Betting.



Mais déjà l’usage en dehors de la gare serait très réduit, cela ne dessert pas grand-chose d’autre. Cela laisserait la mise en accessibilité de la gare à faire en plus. 
Il y a déjà des accès alignés sur les villages de Betting, Béning et Cocheren ; à part la rue de la gare, une passerelle indépendante de la gare ne servirait pas à grand-chose.

Enfin, vu que ce ne serait pas un aménagement ferroviaire, les financements risqueraient d’être plus rares. Probablement laissés à la seule charge de la mairie de Freyming-Merlebach. Autrement-dit cela ne se ferait pas.

Enfin la cerise sur le gâteau : prévoir aussi entre 100 et 200m de cheminement piéton franchissant la Rosselle et se raccordant à la voie verte. On obtient ainsi un chemin privilégié entre la gare et la Cité Belle-Roche (à 500m à vol d’oiseau).


Dernières questions à se poser: l'idée a déjà-t-elle été proposée? Et pourquoi rien n'a été fait?

Ce serait curieux que personne n'ait eu déjà cette idée, tant elle paraît évidente, pourtant on ne trouve pas grand chose, si ce n'est en périphérie d'autres sujets, comme ici.


Et si on peut regretter le manque de hauteur de vue des élus locaux (ne pas voir l’absence d’accès piéton direct et ne s’alarmer que des débordements de stationnement), on ne peut pas nier qu’il manque un parking.

Il y a bien quelques places de parking devant la gare, mais elles sont objectivement peu nombreuses au regard de l’importance de la gare. On ne peut pas vraiment appeler ça un parking.



Or à partir du moment où on ouvre un accès nord, on peut sans problème faire un parking, la place ne manque pas de ce côté.
Non seulement on peut faire aisément un parking de ce côté de la gare, mais en plus il serait facilement extensible.


Voilà donc ce qu’on peut souhaiter pour cette gare de Béning. Une passerelle avec ascenseurs avec accès arrière, ouvrant l’accès directement sur Merlebach (et Belle-Roche) par un cheminement mode doux, calme et deux fois plus court.

La gare vue depuis l’ancien triage désaffecté





Voilà, le thread peut s'arrêter là.

Pour ceux que ça intéresse, on voit deux-trois petites choses aux alentours. Cette ville est vraiment fascinante tant elle regorge de successions de richesses et de stigmates. Mais elle souffre d’un bon demi-siècle d’absence d’investissements.

1) La rue Colson, près de l’hôtel de ville. On a des belles bâtisses, mais minées par le manque d’entretien.
2) Le carreau de Vouters, à Merlebach. Un trésor de patrimoine laissé à l’état de poubelle.
3) Non, ce ne sont pas les plongeoirs de la piscine municipale, mais l’emblématique chevalement de l’ancien puit de Cuvelette, perché sur les hauteurs de Freyming qui domine les alentours, ici vu du fond de vallée de Merle.
4) Le centre commercial des alliés au centre de Merlebach, désaffecté quasi-intégralement depuis une dizaine d’années


A commencer par la passerelle piétonne de «Vouters» franchissant la vallée de la Merle (ou le Merle), y compris la voie ferrée de Falck et la route départementale. Partiellement fermée, elle faisait pourtant un lien efficace entre les centres de Freyming et Merlebach.


1) La passerelle « Vouters » se situe plus au nord, en remontant la vallée du Merle, très encaissée à cet endroit.

2) Vue depuis la sortie nord de Freyming-Merlebach (vers l’Hôpital) Elle franchit la vallée de la Merle ; Freyming à gauche, Merlebach à droite.

3) L’accès à la passerelle a été vraiment bien barricadé. Et même si on peut la grimper par en dessous façon Mimi-Siku, ils ont retiré les plaques de sol…


4) Vue du dessous à l’extrémité côté Merlebach, condamnée.



Freyming et Merlebach sont historiquement séparées par la vallée, et plus physiquement par la voie ferrée. Hormis l’autoroute, il n’y a plus que deux points de passage, qui plus est rapprochés (le pont vert dit «passage supérieur», et le passage à niveau de l’ex-RN3.


1) La vallé du Merle, coupée notamment par la voie ferrée, comporte très peu de points de passage, surtout au nord à cause de la désaffection des équipements.

2) Vue depuis le passage à niveau vers le nord ; on aperçoit le pont, à 150 mètres seulement.

3) A l’inverse, vue sur le passage à niveau et le pont autoroutier depuis le pont vert. 



En fait, la passerelle Vouters n’est que partiellement coupée ; le petit quart côté Freyming est encore utilisable. Il permet de descendre dans la vallée en franchissant la route et la voie ferrée. Mais on atterrit un peu nulle part. 





1) La passerelle permet tout de même de franchir la route et surtout la voie ferrée. Vue depuis la passerelle : à droite Freyming ; à gauche Merlebach ; le long de la route le ruisseau de la Merle (littéralement « Merlebach » en allemand et en platt.
2) La passerelle vue de l’escalier qui permet d’y accéder, vue vers Freyming.
3) Dans le fond de vallée, l’impasse du Docteur Namur (qui va à l’aire des Voyageurs), permet de remonter sur la passerelle depuis Merlebach.
4) Plan de situation



Outre la remise en service de la passerelle, il y a aussi la question du pont de la Merle à Freyming, fermé depuis 2022, qui franchit la voie ferrée, et qui était une des seules autres sorties de Freyming à l’ouest.




Il n’y a pas que du côté de Béning et la Rosselle où la ville est enclavée par des coupures. A part une ouverture vers Hombourg-Haut, la ville haute de Freyming est un vaste cul-de-sac, enclavé vers Saint-Avold ou l’Hôpital, pourtant très proches.



A la couleur du béton et la conception légère, on devine un ouvrage ancien (il date du début des années 50, quand les voitures étaient plus légères et très rares). Ce pont est clairement hors d’âge. Sa réfection coûterait autour de 7M€




Mais le plus gros problème est bureaucratique. Bien qu'il porte une route départementale, ce pont est la propriété des HBL (partis en rase campagne). Le CD57 ne veut pas en entendre parler. Le maire se retrouve laissé tout seul. La construction d'un pont-route franchissant 2 voies ferrées, même au plus simple, ne s'envisage guère sous les 5M€. Hors de portée pour une ville comme Freyming-Merlebach. Chacun peut se planquer derrière la complexité institutionnelle; mais là, c'est au Département de banquer.



Le plus propre serait de rehausser la RD26 au niveau du pont, pour éviter cette rampe en descente. Ça fait un pont plus simple à construire, par contre il faut faire de gros talus. (Faut bien rattraper le dénivelé…)





Dernière chose, derrière ce pont, vous avez pu voir une vieille passerelle comme celle de tout à l’heure. Ce n’est pas la même, et celle-ci ne sert vraiment plus à rien. Elle relie la friche de Cuvelette à l'ancien faisceau de Vouters, entièrement rendu à la nature.

Non seulement celle-ci ne sert plus, ne servira plus, et en plus elle a une longueur d’environ 70m. Donc, si on reprend notre projet de passerelle à Béning, dans le cas d’un franchissement court, on est à peu près à la bonne longueur.


Et donc au cas où cette structure métallique ne soit pas encore trop attaquée, et moyennant un bon rafraîchissement (au cas où...), on peut imaginer son transfert en gare de Béning. Ce serait sympa comme recyclage ; et potentiellement moins cher...




Voilà, cette fois c'est fini pour aujourd'hui (mais il y aurait sans doute encore largement de quoi dire et imaginer!)


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