Episode 12: ➡️Peut-on se passer de l'#A31bis? ⬅️ (11/01/23)

L'A31bis, et avant elle l'A32, défrayent régulièrement la chronique locale depuis près de trente ans. Difficile de planter le décor sans tomber dans un air de déjà entendu.

Quels sont les objectifs de l'A31bis? 

Sont-ils légitimes? 

Comment parvenir aux objectifs cherchés par l'A31bis sans A31bis? Quelles combinaisons d'alternatives peut-on imaginer en fonction des réponses à ces questions? 

C'est l'objet de cet article, qui fait suite à notre épisode précédent: le décryptage critique du dossier A31bis 2022 du maître d'ouvrage (services de l'Etat)


Mais voilà, on a quelques zones grises. D'une part, ces fameux objectifs ne sont pas clairs.

"Fluidifier l'autoroute", ont répondu les services de l'Etat (DREAL). Problème: la hausse de trafic qu'elle annonce (+18 000 AR/j) y saturerait même une 2x4 voies. (on voit ça juste après)

De plus, l'Etat censure toutes les questions sur l'opportunité du projet, estimant le débat tranché. Certaines n'ont pourtant jamais été posées. En particulier ces deux-là:

- Est-ce à la France d'accompagner la hausse des déplacements frontaliers?

- Est-ce opportun?

 

Ces questions, éminemment politiques et éloignées du seul domaine de la mobilité, ne peuvent être tranchées ici. Ce serait trop réducteur.

Et surtout, des scénarii alternatifs à l'A31bis sont possibles quelque soient les réponses. C'est pour cela que nous allons en voir 3.

1) On ne remet rien d'autre en cause que l'A31bis.

2) On remet aussi en cause les efforts des collectivités françaises pour s'occuper du problème

3) On remet en cause l'opportunité de stimuler la hausse de la mobilité.

En réalité les différences ne seront que marginales.


Alors, que se passerait-il si l’A31bis ne se faisait pas ? 

Le bout de l’A6, à Lyon (Perrache). 

L’autoroute ne s’appelle plus autoroute 

mais le paysage est toujours le même.


 

Trois remarques préalables:
1) Un statuquo, faute de résoudre les problèmes, a au moins le mérite de ne pas créer d'autres. C'est déjà pas si mal, vu tous les désagréments cités lors des réunions de consultation A31bis.
2) Cela ne résoudrait aucun problème, certes, mais ne perdons pas de vue que l’A31bis non plus, ne règle pas les problèmes. 
3) Ne pas faire l’A31bis n’empêche aucunement de tenter de résoudre les problèmes par ailleurs, à petite ou à plus grande échelle.



Avant de rentrer dans le vif du sujet, quelques données préalables qui nous serviront tout du long:


Voici la répartition des trafics sur l'A31, tronçon frontalier (Kanfen)
(données recoupées à partir de l'étude de trafic DREAL 2015; les chiffres n'ont quasiment pas bougé sur le dossier 2022)


Les frontaliers ne représentent « que » 60% du trafic total 






Mais ce sont surtout les heures de pointe (HP) qui vont nous intéresser, puisque c'est là que se concentre la congestion. 
Le dossier A31bis 2022 n'évoque aucun chiffre spécifique aux heures de pointe, se contentant des chiffres journaliers. Ces derniers ne veulent pas dire grand chose: si tout ce trafic se partageait équitablement tout au long de la journée, il n'y aurait jamais de bouchons...
Sur les HP du soir, les plus lourdes, redescendent quotidiennement ~8100 frontaliers en 3h.
(source: même doc, p49)

L'Etat prévoit une hausse du trafic due à l'augmentation de frontaliers à venir. D'après leurs données (p20-21), le trafic journalier sur le tronçon frontalier passerait d'ici 2030 de 62k v/j à plus de 100k véhicules/jour



Et en distribuant ce trafic dans les mêmes proportions aux heures de pointe, on aurait donc entre 2500 et 3000 voitures supplémentaires par heure.

C'est là qu'on voit qu'on est au-delà du seuil de saturation d'une 2x4 voies (estimé par le CEREMA à 6000v/h).
















Scénario 1: On ne remet rien d’autre en cause que l’A31bis.

Traduction : serait-il possible d’absorber l’équivalent de la prévision de hausse du trafic sur l’A31 (+38kv/j soit près de 20000 frontaliers pendulaires supplémentaires) autrement que par l’A31 ?

Remarque: paradoxe de Braess oblige, ne pas élargir l’autoroute limiterait la croissance du trafic. Par un report modal plus important, mais aussi la totalité des déplacements. Mais on va ici ignorer ce bénéfice.

D'un point de vue strictement comptable, la solution tout-train pourrait suffir. En Ile-de-France, une branche de ligne Transilien charge entre 50k et 100k voyageurs (A/R) par jour. Sur des lignes à 2 voies, cohabitant souvent avec un peu de fret et de trains grandes lignes.

Notre ligne TER Metz-Lux compte quant à elle... ~9k voy/j. A l'horizon 2030, comme l'A31bis, il est prévu un doublement du trafic TER (20 à 22 kv/j A/R).

Même en admettant que tous les déplacements supplémentaires se fassent aux heures de pointe, y ajouter la hausse prévue sur l’autoroute nous amènerait donc à 40kv/j . 

Et nous avions vu que moyennant quelques modifications ponctuelles d'infrastructure (investissements sans commune mesure avec l'A31bis), il est tout à fait envisageable de transporter plus de 40kv/j, même concentrés en HP.
En heure de pointe, la hausse prévue se situerait en fait sur l'A31 entre 2500 et 3000 v/h. L'équivalent mis dans les trains amènerait la fréquentation aux HP à 30k, soit 10k voy/h. Dans cette hypothèse, "seulement" 10 TER par heure suffiraient, soit nettement moins que ce que nous avions déjà pu envisager.

La limite du tout-train n’est donc pas la capacité du réseau.

Le problème n'est pas non plus d’"obliger" tout néo-frontalier à prendre le train. Il n'est pas question de ça.
En réalité il n’y aura pas environ 30k nouveaux frontaliers français qui vont venir s’ajouter aux 110k existants. Ça, ce sont juste des chiffres. Une somme.
Les néo-frontaliers seront nettement plus, mais il y aura aussi ceux qui reviendront en France, prendront leur retraite, exct… Certains automobilistes laisseront la place à d'autres. 
Simplement, plus les déplacements seront nombreux, moins il sera possible d’utiliser la voiture. 

La principale limite du tout-train, c’est que tout le monde ne vient pas du sillon lorrain. 
C'est la limite du scénario à solution unique. A ce stade, nous allons avoir besoin d’autres alternatives complémentaires.


Les alternatives complémentaires de rabattement, nous les avions déjà égrenées à la fin de notre article d'octobre


Dans un classement (un peu arbitraire) du plus au moins déterminent, on va commencer par: 

1) Les P+R

C'est le levier au plus fort potentiel car la voiture détient la part modale de loin la plus
élevée.
Avec une autoroute encombrée, des trains fluides et des P+R facilement atteignables, on a de quoi réussir un report infiniment plus massif qu'envisagé par les autorités.
 

Par exemple, la gare d’Hagondange est en pleine ville. 

Son parking est grand, payant, rempli quotidiennement 

et difficile d’accès en venant de l’extérieur. 

Les P+R réalisés jusqu'à présent sont trop rares, mais aussi trop confidentiels et mal situés. Les gares étant situées en zone urbaine, le foncier est rare et surtout l’accès facilité en voiture depuis les grands axes est improbable.  

On peut saluer la construction d’un grand park silo à Thionville 
mais le lieu est regrettable. 
Son accès en voiture se fera par le boulevard Schuman, saturé.
Un P+R capacitaire serait + pertinent sur l’autre rive vers laquelle la gare va s’ouvrir.

On avait déjà vu l’intérêt du parking Walygator. Parfait pour être utilisé en P+R. 7000 places existantes, vide à 90% l’essentiel du temps, positionné au niveau d’une gare sur le sillon, et l’accès est royal : une voie rapide directe depuis l’A4, peu de risque de conflit avec son usage premier. Tout à l’avantage du propriétaire d’optimiser ce parking. 



Les places de parkings sont enfin extensibles sur les sites d’Uckange et Hettange-Grande, relativement faciles d’accès en voiture. Mais il est clair que c’est Walygator, par son emplacement, sa facilité d’accès et sa disponibilité immédiate qui est le plus intéressant.




















2) Les transports urbains

Un bus de la Transfensch
en gare de Thionville
Tout le monde aura bouilli devant le choix de placer les P+R en tête. « La solution pour combler la lacune de l’accès au train, ce sont les transports urbains de proximité ! » (voire le vélo). Nous y voici donc.
 
A commencer par Thionville et son réseau de transport catastrophique. Insitutions (SMITU) à la dérive, entreprise en crise, service insuffisant, illisible, défaillances de réalisation ininterrompues depuis une décennie…

La priorité, avant même de se focaliser sur un TCSP (Citézen), serait déjà de rétablir le minimum.


Et établir des liaisons reliant la Fensch à Uckange (via Fameck ou Florange), et à Hettange-Grande (via Algrange ou Elange). Il n’y a même pas d’arrêt de bus en gare d’Uckange alors que des bus passent devant !
Un exemple de réseau de transport urbain restructuré



Plus au sud, nous avons déjà fustigé l’absence de réseau de transport urbain dans le bassin Orne-Moselle (concentration urbaine destructurée mais dense, qui abrite tout de même environ 100000 habitants. Qui permettrait là-également de se déplacer pour de courtes distances intra-urbaines, tout comme faciliter le rabattement sur les gares d’Hagondange et Maizières.
Avec la CCPOM (Marange Amnéville Rombas Moyeuvre), les Rives de Moselle forment une agglomération de 100k habitants. Sans réseau de transports en commun.


3) Les lignes TER de proximité

On parle en ce moment de RER métropolitains. Il est évident que Thionville ne sera pas concernée par le plan de communication présidentiel, mais rien n’empêche de prendre les devants.
Du fait de cette sur-mobilité vers Luxembourg, l'étoile ferroviaire de Thionville a un potentiel de développement particulier. Or, pour l'instant seule la ligne du sillon lorrain est exploitée. Quel gâchis!
On en parlait à la fin de cet article sur les trains légers.



✅Voyons enfin les alternatives complémentaires. Celles-ci ont l'avantage de sortir complètement du tout-train.

1) le covoiturage

Le développement a jusqu’ici été plutôt décevant, mais cette alternative est incontournable tant le potentiel réducteur de trafic est énorme.
Les pendulaires sont globalement réguliers, ce qui facilite la pratique. 
On peut combiner le confort type blablacar et le spontané type autostop. Un conducteur peut ainsi proposer des trajets plusieurs jours à l’avance. Et prendre des gens en + au dernier moment.

Quels moyens ?
C’est là que le recours à des supports numériques est utile. Problème de plus en plus récurrent dès qu’on sort du service public : l’offre s’est segmentée sur plusieurs plateformes concurrentes. Ce qui divise l’efficacité. 


Il y a aussi un problème d’instabilité de ces sites, souvent produits par des startup fragiles, ce qui compromet la maintenance et l’efficience de l’outil à moyen terme.
Le regroupement vers un portail robuste paraît incontournable.

Quelles infrastructures? 
Les parkings n’ont pas besoin d’être bien fignolés (avec les bordures et tout), mais surtout d’être très bien positionnés. Donc sur les échangeurs autoroutiers. L’utilisation des P+R de Metzange voire Roussy-le village est souhaitable.  
Il est aisé de fragmenter les propositions de trajets "A31" sur les principales destinations (Lux-ville, Kirchberg, Cloche d’Or, Leudelange, Belval…) A ces endroits il faut surtout prévoir des aires "pick-up" pour assurer le regroupement pour les retours.
 Photo @ Radio Espace
Il est évident que la pratique sera d’autant plus stimulée que les covoitureurs pourront échapper aux bouchons. Une voie dédiée sur l’autoroute, ou l’autorisation d’emprunter une voie autocars serait + attractive, mais nous sommes dans un scénario sans toucher à l’A31.

D’autre part, il faudra que les moyens permettant d’assurer que les voies dédiées soient réellement empruntées par des covoitureurs soient bien au point. 


Quel potentiel ? Le dmo A31bis ne donne aucun objectif chiffré (ce n’est donc pas pris en compte dans les 18k frontaliers supplémentaires attendus). Côté Luxembourg, on donne « objectif 1 voiture sur 2 à au moins 2 personnes

Sur l’A31 nord passent aux heures de pointe ~9000 voitures de frontaliers (3000 v/h), remplies en moyenne d’1,1 voyageurs. Soit ~26000 sièges vides. Si leur taux de remplissage augmentait de la sorte (1,6), ce trafic baisserait à 6200 (2000 v/h). 


Pour contenir la hausse annoncée (+9k en HP), il faudrait monter le taux de remplissage à 2,2. Ambitieux. 
L’objectif d’un taux à 1,6 contiendrait le trafic à 12k (4k v/h). Le covoiturage peut donc aisément absorber à lui-seul les deux tiers de la hausse annoncée.



2) L’autocar. 🚌
Photo Julio Pelaez (Républicain Lorrain)

Levier très efficace pour permettre une hausse du nombre de frontaliers sans surcharger nos routes.
C'est le meilleur complément du train: il va (quasiment) partout... 
Mais c'est pour cette raison que le sujet est difficile à appréhender. Il va falloir resté ancré à notre fil conducteur : capter des usagers de l’A31 aux heures de pointe... Au risque de faire face à des situations cocasses.
Cela voudrait dire qu'on aurait un service d'autocars réguliers vers le Luxembourg, pendant que l’absence de service digne de ce nom vers les villes de proximité ne sera pas corrigée...

Ne serait-ce que faire le point sur les lignes (RGTR) existantes et a fortiori envisager leur développement, nous renvoie à l’inconséquence de ce qui nous sert de service public en zone rurale (Fluo)


Et on va devoir borner la réflexion aux seuls villages susceptibles d’utiliser l’A31. Ce qui crée une inégalité de traitement, les autres villages étant exclus d'emblée.
En tenant compte de ces critères, voici donc l’état des lieux.


Voici ce que deviendrait cette carte en actionnant les leviers précédemment cités : l’étoile ferroviaire de Thionville et un réseau Citéline/Citézen correct:


Voici alors ce que pourrait donner un développement de ces lignes, en les prolongeant, les réorganisant, et en créer 2 nouvelles.


A partir de là les scénarii sont multiples, mais voici ce que pourrait donner une réorganisation. A savoir qu’en l’état actuel des choses ces lignes sont financées et tenues par le Luxembourg. 


Les décideurs seraient d'autant plus inspiré de s'emparer de ce sujet que les Luxembourgeois s'apprêtent à remanier leur réseau RGTR. Et pas forcément dans le sens d'un meilleur maillage.

De combien tout ceci pourrait-il décharger l’A31 ? On passerait donc de 7 lignes remplies moyennement à 10 dont on peut espérer un meilleur taux de remplissage. Cela nous amène entre 2500 et 3000 passagers (toujours en 3 HP).
Potentiellement 1/3 de la hausse annoncée sur l'A31 en moins.
 
Vue aérienne du nouveau P+R de Metzange, au nord-ouest de Thionville


La voie véhicule lents sur la montée de Zoufftgen, en direction de la frontière luxembourgeoise. Elle fait place à une voie véhicule lents (fermée récemment) sans être élargie.
Là-encore une voie dédiée ferait du bien à l'attractivité du mode; là-encore on est dans la perspective de s'en passer.
Remarquons tout de même que la bande d'arrêt d'urgence de l'A31 est transformable sans travaux (autre que peinture). La preuve: la voie véhicules lents.
 




Un autocar Vandivinit dans
l’agglomération thionvilloise
En cas de succès les fréquences peuvent naturellement être accentuées. Plus les passages sont fréquents et plus ils sont attractifs.
Ces services d’autocars peuvent être mis en place facilement, mais aussi réduits tout aussi facilement, si un jour la mobilité frontalière se mettrait à re-diminuer.





Enfin pour finir, l'absence de réalisation du Contournement Ouest de Thionville n'interdit pas des adaptations locales. Par exemple, le complément de la bifurcation de Richemont pour permettre des liaisons Fameck <> Luxembourg. Ou une rue reliant Bétange à Ste-Agathe.







S'agissant des coûts, c'est assez complexe car il y a plusieurs acteurs. L’A31bis, c’est l’Etat, mais ce projet s'autofinance. (Que les usagers ne payent jamais le juste prix dans le système concession n’est pas pris en compte).
Les autocars RGTR sont financés par le Luxembourg.
Le TER, quant à lui ne s’autofinance qu’à ~28%, la Région paye le reste. Mais c'est une moyenne. Nous n'avons pas pu savoir spécifiquement pour les TER des HP, mais on peut gager que, remplis, ils s'autofinancent, et les ajouts de trains sont à peu près neutres budgétairement.



Voilà donc pour le scénario 1. Oui, on peut se passer de l’A31bis en mobilisant les alternatives habituelles, sans rien remettre d’autre en cause et sans se poser d’autre questions. Mais on peut aussi se poser d’autres questions et remettre certaines choses en cause. 




Synthèse du scénario 1. On voit les limites de l'A31bis, même pas suffisante pour absorber l'augmentation du trafic que l'Etat nous prédit; et les capacités bien plus intéressantes des alternatives qui pourraient être dégagées.









Scénario 2: Faire contribuer le Luxembourg

Il n’est pas question ici de remplacer une mesure par une autre, il n’est toujours pas question de réduire ou contrer l’augmentation du nombre de frontalier à venir. Mais de mobiliser des moyens en plus pour faciliter le report modal.

Par rapport à ce sujet hautement sensible qu’est la mobilité frontalière, beaucoup d’encre coule mais certaines questions sont laissées taboues. Notamment celle-ci : les moyens pharaoniques demandés par cette sur-mobilité doivent-ils être assumés par les collectivités françaises ?
 
S’agissant des élus locaux, la réponse est évidente : il y a une forte demande de leur électorat. (Et donc une opportunité de clientélisme à grande échelle). Mais la demande est-elle légitime ? 
La question, à défaut d'être tranchée ici, mérite d’être enfin posée.
Financièrement, souvenons-nous que l’A31bis mise sous concession ne serait pas payée par le contribuable français. Mais le problème revient par derrière, puisque dans ce cas-là on confisque l’utilisation gratuite d’une autoroute financée une 1ère fois par le contribuable.

D’où l’idée de prendre Luxembourg au mot lorsqu’il se dit prêt à « cofinancer des projets frontaliers ». Il n’y a d’autant moins de complexe à voir lorsqu’on a une idée de l’arnaque par rapport aux compensations accordées, par exemple, à Arlon. https://twitter.com/Dim1tri1/status/1604144296390807557
Et au lieu de cofinancer des investissements d’infra, leur faire prendre en charge la mobilité dont ils sont l’exclusif bénéficiaire?
Par ex les trains.km entre la frontière et Thionville? Après tout le trafic s'y compose quasi-exclusivement de travailleurs frontaliers.
 
Cela permettrait, pour le TER comme l'autocar, d’y étendre la zone de gratuité. 
Et là on marque un gros coup dans l’attractivité. 
Dans le même temps, les économies faites par la Région (sur les trains d’heure creuse), peuvent être redéployées dans les territoires plus reculés.

Voilà pour le scénario 2 : pas grand-chose de plus, on pousse simplement plus loin l’audace sur le plan politique. Et par la même les moyens qu’on se donne pour massifier davantage le report modal.




Voyons le scénario 3 pour finir : la combo on n’augmente pas l’autoroute, on développe les TC tous azimuts ET on travaille à réduire la mobilité en parallèle. C’est là que ça commence à devenir intéressant. 


[Message de service à qui, à la lecture de la dernière phrase ressentirait un début d’ulcère. N’allez pas plus loin, restez sur le scénario 1, c’est pour vous qu’on l’a fait !]



Peu importe qui en porterait la charge, augmenter les infrastructures pour accompagner (sinon stimuler) la hausse des déplacements est-il opportun en tant que tel? 
Voulons-nous pousser cette situation de sur-mobilité à un niveau encore plus problématique qu’il ne l’est déjà ?
Rappelons que, le simple fait de ne pas réaliser l’A31bis suffirait à réduire l’augmentation du trafic attendue. Cette situation a déjà été testée en Lorraine depuis les années 90. 

Mieux que cesser d’ignorer le paradoxe de Braess, l'Etat ferait encore mieux en l'utilisant comme levier. Les précédents scénarii consistent à utiliser ce phénomène en faveur d’un report modal vertueux et massif. Il peut l’être aussi pour freiner la croissance frontalière.
Cela irait dans le sens des engagements pris par la France, et dont l’A31bis s’oppose frontalement.
C'est incroyable ce grand écart de l'Etat entre ses opérations de com et la réalité...

Et on observe déjà le phénomène: "39 % des salariés [sont] prêts à quitter leur emploi" (les Frontaliers)

Globalement, le temps accordé à un trajet quotidien ne varie pas trop (il est supérieur à la moyenne pour les frontaliers Fance-Lux).


La hausse des embouteillages a probablement freiné la tendance des frontaliers à venir de toujours plus loin.

Car oui, le phénomène inverse est lui-aussi vérifié.
Ne pas augmenter les capacités du réseau routier aurait donc pour tendance de contenir le trafic automobile à un niveau élevé mais stable. Comme ce qu'on a observé à Nancy.

Et avant même de décréter si cette orientation est souhaitable ou pas, il faudrait déjà poser la question. Or, ce débat n'a jamais eu lieu. Les politiciens locaux, surtout ceux des villes l'ont toujours balayé.
Voilà pour le scénario 3.



4 Pour finir: les alternatives moins déterminantes.


Elles sont souvent citées mais on ne les a pas sélectionnées. On y retrouve en premier lieu notre célèbre mesure-phare: le télétravail

Assez difficile à appréhender. Testé avec succès pendant le confinement; aujourd'hui limité par des conventions internationales (essentiellement d'ordre fiscal), le potentiel de réduction de mobilité semble énorme: 40k AR/j. ...

Oui, mais au global sur le Grand-Duché...
Si on incrémente ce même ratio (40,5% à 1 jour télétravaillé) sur nos 9000 navetteurs de l'A31 aux heures de pointe (cad aux heures de bureau où circulent les employés les plus "télétravaillables", 9000 x (40,5% x 20%)=... 810. De la gnognotte. Même en faisant le calcul avec le doublement de ces navetteurs d'HP, et même en doublant ce chiffre (2 jours télétravaillés par semaine au lieu d'1), cela reste insignifiant.

Pendant ce temps, de nombreux scientifiques remettent en cause le potentiel du télétravail sur la mobilité.
Donc difficile, hélas, de compter sur le télétravail pour faire baisser significativement la mobilité sur l'A31.

De même, l'ouverture de TER sur l'ancienne ligne Fontoy-Belval ou les "RER métropolitains" (hors étoile de Thionville), auraient peu d'impact direct sur l'A31.
 


On y retrouve aussi les mesures visant à réduire le transport de marchandises. Aux heures de pointe, malgré leur gêne supérieure, les poids-lourds ne sont même pas 10% du trafic.
Cela concerne le ferroutage ou le port fluvial d’Illange.

Toutes ces solutions sont pertinentes, parce qu’elles contribuent à faire baisser le trafic routier. Travailler ces sujets est indispensable.

Néanmoins, s'agissant de la décharge de A31, elles ont un impact nettement moindre que ce qui a été évoqué précédemment.


Conclusion:


1) la ligne ferroviaire suffirait largement à elle seule à absorber la hausse de frontaliers sur l'A31 annoncée par l'Etat d'ici 2030. Le covoiturage quant à lui peut largement en absorber à lui-seul les deux tiers.


ci-contre: la synthèse du scénario 1




2) Absorber cette hausse sans A31bis est d'autant plus 
faisable en mobilisant en plus l'autocar, les TER sur l'étoile de Thionville, des P+R stratégiquement positionnés et un réseau de transports urbains thionvillois correct.  








3) Les hausses de trafic prédites semblent excessives, voire délirantes (le nombre de frontaliers sur l'A31 serait doublé d'ici 2030). Quoiqu'il en soit, si on ne fait pas l'A31bis, paradoxe de Braess oblige, le trafic augmentera beaucoup moins.








Illustration Tram T2 (IDF)

4) Reste à questionner l'opportunité d'accompagner, de stimuler cette hausse de sur-mobilité à un niveau encore plus problématique qu'elle ne l'est déjà.




     *FIN*
 



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